Janvier

Jeudi 7 janvier
Nouvelle année, nouvelles résolutions. Ma volonté première est de maîtriser de mieux en mieux mon travail et de regonfler à bloc ma paire de couilles, ceci écrit avec élégance. Ma relation avec Kate ne doit plus me miner jusqu'au trognon. Je suis condamné à respirer le bonheur. Non point être béat, mais m'épanouir suffisamment pour conquérir le monde.

Lundi 11 janvier
Gentil week-end avec Kate. Pas de transcendance il s'en faut de beaucoup, quelques altercations comme à l'accoutumée, mais de tendres passages sniffés pour maintenir mon équilibre.

Ce matin, ma Kate rate son train et me tient ainsi compagnie dans mon bureau. Le programme est surchargé et je dois procéder avec méthode et sérénité, sans négliger l'enthousiasme et la spontanéité.
Il est très tard. Chapeau melon et bottes de cuir, en ambiance de fond, achève de me faire tomber du nez vers ces petits carreaux.

Samedi 16 janvier
Journée au château d'Au. Elimination des toxines et renforcement des biceps à l'ordre du jour. Moyens simples, peu onéreux : caillasses et vélocipède.
Je charge et décharge à répétition avant d'aller pousser de la pédale.
Primo, faire le max de brouettées à verser pour que Maddy, consciencieuse comme un manœuvre de première, les étale de tout leur long. Les bras se chauffent, le manche s'adapte de mieux en mieux à la pogne, la tranche s'enfonce de plus en plus aisément, salope ! nom de dieu ! vas-y mon gars ! Une trentaine à la suite, ça vous dégage rapidos les pores et redonne un sens à votre physique ; la valeur de chaque muscle se dessine sous la chair.
Je ne m'arrêterai point là, on me connaît. Manier de la pelle ne peut me combler totalement.
Je convie Madeleine à une petite escapade sur deux roues, tous phares dehors. Chacun bien posé sur sa selle, la traversée d'Au commence ; nous passons devant le château Richard, et là le paysage s'annonce : montée à l'horizon... non, non, ascendance déjà sous nos fragiles pneus ! Maddy flanche de suite. Oh la la ! premier abandon ! « Tout à fait, tout à fait Thierry ! »
A l'air, le firmament pointe ses brillances et je décide de poursuivre l'aventure. Objectif : Marle. Un grave problème de gravité et d'inclinaison se révèle : les descentes ne sont jamais suffisamment pentues et durables pour aborder leur versant avec assez de puissance. Résultat : je suis contraint de jouer au con. Pousser fort, ho hisse, hardi les gars ! C'est beau certes, mais ça n'en finit pas. Et puis tous ces blaireaux d'empaffés qui se permettent de me doubler dans un sens, et de m'éblouir dans l'autre. Au piquet tous ces quatre-roues de mes deux !
Enfin, luisance chérie, Marle est là, à quelques tours de chaîne. Pas de répit pourtant. Les variations d'altitudes s'intensifient : je plonge vers le centre ville, puis grimpe vers la périphérie. Encore heureux que je n'ai pas hissé les voiles toutes vers Laon. La vieille ville m'eût achevé.
Pauvres de mes gambettes, le retour s'annonce plus rude encore. Il me faut coûte que coûte rejoindre le château. Je concentre toutes mes ressources, jusqu'à celles nichées derrière les lobes, pour me farcir en victorieux ces chiasses à couilles (juron favori bien qu’incompréhensible) de montées.
Devant la grille aux tulipes ès Maurice, je descends de ma monture, vanné, les guibolles flageolantes, mais heureux de cette épopée humaine, une des plus belles que la Thiérache ait connue.
Merci mon Dieu, de nous avoir doté de la mobilité. Journée finie, l'œuvre physique achevée, je retourne épanoui aux affaires.
Peut-être qu'un jour ma grosse me fera cet effet ressourçant, sait-on jamais...

Dimanche 17 janvier
L'actualité s'affadissait sans Saddam. Le voilà de retour, plus vigoureux et provocateur que jamais.
Bush va laisser sa merde au tout jeune Clinton. Good luck Bill !
Ce soir, le comique reprend ses droits : un tomahawk (missile américain) touché coulé par les Irakiens, se casse la gueule sur l'hôtel des journalistes du monde entier, à Bagdad, sans qu’un seul reporter finisse les tripes à l'air. Saddam est là : Poivre d'Arvor et moi on est aux anges.

Lundi 18 janvier
Début en trombe. Je redoutais depuis quelques semaines ce mois de janvier : sorties de fêtes alliées à des charges énormes. Le coup de massue est plus violent que prévu : la banque Scalbert & Dupont de la sebm refuse de prendre à l'escompte les traites de la seru, soit 200 000 F, alors que les précédentes ont toutes été honorées sans aucun problème. Injustice absolue. Nous en saurons plus dans les jours qui viennent.

Mardi 19 janvier
Pitoyable soirée des 7 d'or sur France 2. En bref : cérémonie gluante du parisianisme public. TF1 est quasiment exclue de la fête. Honteuse malhonnêteté de Bourges et de ses collaborateurs. Souhaitons leur un déficit encore plus monstrueux et un empalement définitif sur leurs récompenses.
Harlem Désir ne doit pas être au plus jouissif de sa forme. Son Mouvement est sous terre avant même d'avoir démarré. La gueule enfarinée, il déblatère ses inutiles espérances dans son adhésion à Génération écologie.
Mon cher Saddam poursuit ses tours de passe-passe.

Mercredi 20 janvier
Le coup de poignard porté à la sebm par la banque Scalbert & Dupont est intolérable. Fondement du refus systématique d'escompter les traites seru : tout le papier émanant de l'imprimerie et de l'édition est banni. Discrimination envers un secteur complet de l'économie. La Scalbert est pourtant une banque nationalisée depuis 1983 par le biais d'une prise de participation majoritaire du gan. Est-ce acceptable de subir Lang se secouant les frisettes à la Fureur de Lire et d'endurer les diktats exterminateurs d'une banque d'Etat ?
Il nous faudra allier stratégie et détermination car le service Infobanque m'a affirmé qu'il n'y a aucun moyen d'attaquer en justice une telle directive interne.
Vu les confessions de Mme Claude sur TF1. Conception très saine de son métier, de la femme et des relations humaines. Droite, logique dans sa tête, une femme rare, je me risque à l'écrire.
Je découvre un talent de comique, malgré lui, chez Fabius invité à la grand-messe de Cavada.

Jeudi 21 janvier
Madame Lenanan et sa banque Hervet commencent elles aussi à nous les tailler menu menu.
Bicentenaire de la décapitation du Roi Louis XVI. Est-ce le règne de Fanfan qui a redonné goût aux Français pour la royauté, mais une majorité de sondés désapprouve cet assassinat. Alors pourquoi garde-t-on en place les dirigeants héritiers de ce massacre ?

Dimanche 24 janvier
0h21. Infernaux ces mois qui défilent sans qu'on n'y puisse rien. Je suis là, au fond de mon dodo, griffonnant pour tenter de me détendre, et la sourde musique des bourrasques nocturnes me berce.
Samedi, journée au château d'Au avec Hermione, Karl et Maddy. La mission est de saison : remballer toutes les décorations de Noël qui ont embelli magnifiquement la salle à manger et le petit salon.
9h22. Le sommeil m'a enlevé avant l’achèvement. La tempête n'a pas chômé les heures passant. Arbres et sapins se balancent généreusement : à quelques mètres devant ma fenêtre, le tilleul joue de ses tentacules mais reste relativement roide ; derrière, dans une autre propriété, se profilent trois sapins qui vont et viennent sans retenue. Pour quelques heures la tempête donne à la flore la mobilité et l'expression qui lui manquent. Si ouragan il devait y avoir, j'espère qu'il ne viendra pas perdre son temps dans le Santerre, mais qu'il ira plutôt nettoyer les puants bouts de terre occupés par les Croates et les Serbes dans la feue Yougoslavie.
23h41. Kate n'a pu venir me voir aujourd'hui par suite de déficience de la sncf. Repas familial avec Heïm, puis après-midi dans la pommeraie pour faire disparaître la béance dans le mur de canisses.
Le vent souffle sans discontinuer à travers les champs plats. Il nous faut un étai digne de ce nom.
Faut-il le déplorer ? Un des chanteurs des Négresses vertes est mort par overdose.

Lundi 25 janvier
La fin du mois s'annonce plus pressante et les charges plus pesantes que jamais. Le travail de gestion, de calcul des coûts, de rationalisation de l'activité, d'économies tous azimuts, est pour le moins considérable.
Ce soir, l'indémodable, le formidable Drucker reçoit dans sa grande halle une bonne charretée de présentateurs du sacro-saint Vingt-Heure, depuis le pionnier Sabbagh jusqu'à l’élégante Chazal de TF1.

Samedi 30 janvier
1h02 du matin. Terrible semaine pour les finances. La baisse spectaculaire des rentrées de souscriptions, 375 000 F en janvier contre 614 000 F en décembre, alliée à de très lourdes charges, nous a obligé à de savantes contorsions.
Rarissime chez moi, je vais dire du bien d'une banque : le Crédit agricole, et en particulier M. Débloquet. Chargé de notre compte, s'est révélé un bon partenaire. Il augmente de manière conséquente notre ligne de découvert pendant un mois. Pour une fois, le bon sens fait surface.
Rencontre vendredi avec Lasile et Boulon, respectivement directeur commercial et chef des ventes de la Poste de la Somme. Là, rien d'enthousiasmant. Ils restent bien ancrés dans le fonctionnariat, même si leurs bretelles sont remontées par le Ministre de tutelle pour des impératifs de rendement non atteints.

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